Paul-Jacques Bonzon et les prix littéraires

La création de prix littéraires répond à cette double nécessité : reconnaître les mérites d’un auteur et, en même temps, distinguer plus particulièrement un ouvrage. Au final, l’auteur comme l’éditeur doivent en retirer bénéfice. Le but de tous les prix littéraires est toujours d’encourager le développement d’une littérature de qualité. Paul-Jacques Bonzon va s’engager dans le processus avec son quatrième ouvrage : Du gui pour Christmas, publié en 1953.

La place que prend la littérature pour la jeunesse et la notoriété qu’elle acquiert entraîne inéluctablement un besoin accru de reconnaissance. La création de prix littéraires répond à cette double nécessité : reconnaître les mérites d’un auteur et, en même temps, distinguer plus particulièrement un ouvrage. Au final, l’auteur comme l’éditeur doivent en retirer bénéfice. Le but de tous les prix littéraires est toujours d’encourager le développement d’une littérature de qualité. Ce faisant, ils révèlent, dans les choix qui sont opérés, les attentes morales d’une société à une époque donnée1. Les prix littéraires pour la jeunesse sont aussi nombreux que variés. Il n’est que de consulter le répertoire réalisé par la Bibliothèque internationale de livres pour la jeunesse qui mentionne, dès 1983, pas moins de cent quatre-vingt-treize prix pour trente-huit pays cités2. De nos jours, il n’est guère de rencontre, de salon, d’exposition qui n’ait de prétention à créer son prix. Nombreux sont les prix et récompenses attribués aux auteurs et illustrateurs de littérature jeunesse : cent vingt-sept prix relevés pour la France par Ricochet-jeunes3.

C’est aux cours des années 1932-1933 que Michel Bourrelier décide de fonder un prix Jeunesse. C’est le premier en date décerné à un manuscrit. Lily Jean-Janval et Léonce Bourliaguet vont être parmi les premiers à être honorés.

Les prix vont se multiplier et se diversifier dans ces années d’après-guerre et plus particulièrement au cours des années cinquante, tant au niveau national qu’international. Citons les principaux sinon les plus représentatifs : le prix Enfance du monde, le prix du Salon de l’Enfance, créé en 1953, le prix Jean Macé, de la Ligue de l’enseignement, décerné pour la première fois en 1958, le grand prix de la littérature pour les jeunes de la Fédération des associations de parents d’élèves des lycées et collèges français, créé en 1959, le grand prix littéraire de l’Afrique noire d’expression française attribué pour la première fois en 1961 à l’auteur ivoirien Aké Loba pour son roman  Kocoumbo, étudiant noir. Le Dr Edmond Locard annonce au directeur de la maison d’édition Hachette, dans un courrier de Lyon en date du 4 avril 1959, que l’académie du Merle Blanc a créé, le 13 février 1959, le prix Edmond Locard de littérature policière pour la jeunesse, destiné à récompenser l’auteur d’un roman policier rédigé en langue française édité dans l’année.

L’Académie française4 décerne chaque année depuis 1891 le prix Sobrier-Arnould destiné à récompenser les meilleurs ouvrages en littérature morale et instructive pour la jeunesse. Le prix de la Joie par les Livres est créé en 1965.

L’union internationale pour les livres de jeunesse décerne le très célèbre et convoité prix international du Livre pour la jeunesse Hans-Christian Andersen. Le prix est décerné par un jury international à un « écrivain vivant qui, par une œuvre remarquable, a servi la cause des saines publications destinées aux jeunes ». Depuis 1956, le prix est décerné tous les deux ans sous la forme de médailles et de diplômes. La médaille peut figurer sur la couverture du livre couronné. En 1959, la France, qui n’est pas membre de l’Union, est cependant invitée à concourir. René Guillot est à ce jour le seul écrivain français à avoir obtenu ce prix en 1964.

L’académie internationale de culture française à Bruxelles décerne deux prix. Le prix de l’éducation Achille Marchal distingue « un ouvrage écrit en français paru en librairie montrant la nécessité de doter la jeunesse d’une solide éducation intellectuelle, scientifique, artistique, morale et civique ». Le second, le prix Henri-Jacques Proumen, est décerné à « un ouvrage écrit en français destiné aux adolescents et adolescentes de quatorze à dix-huit ans exaltant la bonté, l’altruisme, le courage, la droiture, les nobles qualités de cœur et d’esprit ».

Il en existe très certainement bien d’autres, tant la littérature pour la jeunesse suscite de l’intérêt. Les candidatures sont parfois nombreuses. Elles peuvent être portées par l’éditeur lui-même. Elles peuvent être individuelles. L’auteur adresse alors directement son ouvrage au secrétariat du prix.

Paul-Jacques Bonzon va s’engager dans le processus avec son quatrième ouvrage : Du gui pour Christmas, publié en 1953.

Prix Jeunesse

L’idée de ce prix est attribuée à l’éditeur Michel Bourrelier. Créé en 1934, il est décerné pour la première fois en 1935 et le sera jusqu’en 1972. C’est assurément une idée originale pour l’époque. Il devait susciter un élan de création chez les écrivains qui pouvaient espérer voir leur œuvre manuscrite remarquée puis éditée. Le prix Jeunesse apportait également un regain de confiance au public adulte du fait même de la légitimation conférée par la qualité des membres du jury. Dès le début, aux côtés des professionnels des bibliothèques et des enseignants, ont été désignées des personnalités connues. Parmi ces dernières figurait Paul Hazard, professeur de littérature comparée au Collège de France à qui fut confiée la présidence. Mathilde Leriche5 rapporte la description de son approche : « on consultait des dossiers, on prenait des notes, de la pile des manuscrits, lourds ou légers, roses ou verts, on extrayait tel ouvrage qu’on voulait relire au bon endroit. Il y avait des charges, des retraites et d’amicales mêlées. Ah ! Comme il est difficile au juste de discerner les mérites d’un livre pour enfants. » Georges Duhamel succède à Paul Hazard, en 1944. Charles Vildrac prend le relais en 1949 et assure la présidence jusqu’à sa disparition en 1971. Le prix cesse d’être décerné.

Pour son quatrième livre, Paul-Jacques Bonzon revient chez Bourrelier, son premier éditeur. Il en est récompensé. Certes, il n’a pas la récompense suprême en cette année 1953 qui est attribuée à un de ses collègues, Louis Delluc, instituteur comme lui, pour Le mousse de la Niña. Il est néanmoins second prix Jeunesse ex aequo pour Du gui pour Christmas6 publié dans la collection Marjolaine, ce qui lui apporte le droit d’une mention appréciée en première de couverture. C’est assurément un honneur et une reconnaissance.

1 Despinette, Janine, in Revue Enfance, Paris, P.U.F., numéros double 3-4, 1984.

2 http://bbf.enssib.fr : BBF 1983 – Paris, t.28, n° 6, Children’s prize books , an international listing of 193 children’s literature prizes.

4 http://www.academie-francaise.fr/role/baseprix/prix_ancien.asp et http://www.academie-francaise.fr/role/prix_fondations2002.html (devenu le prix Montyon en 1976 destiné « aux auteurs français d’ouvrages les plus utiles aux mœurs, et recommandables par un caractère d’élévation et d’utilité morales. »

5 Leriche, Mathilde, 50 ans de littérature pour la jeunesse, Paris, Magnard, L’Ecole des loisirs, Collection Lecture en liberté, 1979, 156 p. ISBN : 2-210-46114-6.

6 Se reporter au chapitre consacré à la Manche pour une analyse de l’ouvrage.

Couverture Gui pour Christmas

Du gui pour Christmas, éditions Bourrelier, collection Marjolaine, 1953.

2e prix jeunesse 1953

Cette récompense est évidemment une invitation à poursuivre.

Prix Enfance du monde

Le prix Enfance du monde a été créé en 1955 par le Centre international de l’enfance.

Fondé dès 1948 par le Pr Robert Debré1 et le Dr Ludwik Rajchman2, Le Centre international de l’enfance dont la résidence définitive se fixe à Paris, au château de Longchamp en 1951, est destiné à former à la pédiatrie sociale les futurs cadres de la santé publique des pays gravement touchés par la guerre ou en voie de développement. C’est au cours de cette même année 1951 que le secrétaire général apporte lors de la cinquième réunion du conseil d’administration des précisions sur les activités du centre. Outre l’enseignement, la pédiatrie, les maisons et villages d’enfants, la recherche et les soins, se trouvent mentionnées la psychologie de l’enfant et la mise en œuvre de bibliothèques d’enfants.

C’est dans ce cadre qu’en 1955 Mme Robert Debré fonde le prix Enfance du monde. Ce prix d’une valeur de deux cent mille francs est destiné à couronner un manuscrit ou un livre s’adressant à des enfants de huit à onze ans, écrit directement en langue française. Il a été créé « pour susciter une littérature juvénile d’ouverture culturelle conduisant à une meilleure compréhension internationale »3. Le jury est composé de l’inspecteur général des bibliothèques, d’un représentant de la direction des bibliothèques de France, du conservateur de la bibliothèque de Versailles. La présidence du jury est confiée à des académiciens. En 1956, C’est Jacques de Lacretelle, académicien, qui préside le jury qui couronne Léonce Bourliaguet pour Pouk et ses loups-garous, publié chez Magnard. La remise du prix a lieu au château de Longchamp.

Mais en cette année 1955, pour la première année du prix, c’est Paul-Jacques Bonzon qui se voit distingué pour Les orphelins de Simitra. Le jury est présidé par l’académicien André Maurois.

L’ouvrage, illustré par Albert Chazelle, est publié par Hachette dans la très belle collection Idéal-Bibliothèque. Il comporte un sous-titre : Le relais de l’Empereur. C’est le titre proposé par l’auteur4 que l’éditeur n’a pas souhaité retenir. Le 22 avril 1955, l’auteur précise à Louis Mirman, responsable du département Jeunesse des éditions Hachette, « qu’aucun des titres proposés ne le satisfait vraiment mais que de toute manière il faudra conserver en sous-titre « le relais de l’Empereur » étant donné la publicité qu’il a déjà entreprise dans les milieux enseignants. »

Il faut préciser que la Grèce subit régulièrement de violents tremblements de terre particulièrement destructeurs comme celui de 1953 ou encore celui de 1955 où la ville de Volos est presque entièrement détruite.

L’histoire est simple. Sous le chaud soleil de la Grèce vivent deux enfants heureux, Mina la petite fille et son grand frère Porphyras. Les parents, petites gens de la terre, soucieux d’assurer l’avenir de leurs enfants, décident de changer d’orientation et d’ouvrir un garage. Porphyras rêve d’être pompiste dans la petite entreprise familiale. C’est sur le point de se réaliser, quand une difficulté retarde l’installation de la pompe à essence tant attendue. Papa Christophore charge son fils d’aller à Simitra informer les maçons et de rapporter deux sacs de ciment pour tenter de réparer la fosse lézardée, sans doute à cause d’une malfaçon. Mais sur le chemin qui conduit à Simitra, survient une catastrophe : « La terre tremblait ». Simitra est détruite. Des décombres de la maison, seule survivante, Mina parvient à s’extirper. Les deux enfants vont se retrouver seuls au monde. Finalement, traversant une série d’aventures qui sont autant d’obstacles à franchir, Porphyras, en garçon courageux et volontaire qu’il est, et sa sœur, d’un pays à l’autre au travers de l’Europe, parviendront à rejoindre leur pays natal et le beau ciel de Grèce.

Le contrat est établi le 29 mars 1955 pour le Relais de l’Empereur dans la collection Idéal-Bibliothèque.

1 Robert Debré, né à Sedan (Ardennes) le 7 décembre 1882 et mort au Kremlin-Bicêtre le 29 avril 1978, est considéré comme l’un des fondateurs de la pédiatrie moderne.

2 Ludwick Rajchman, médecin polonais, né à Varsovie le 1er novembre 1881, devient le premier président de l’UNICEF fondée en 1946. Il décède à Chenu (Sarthe) en 1965.

3 Revue Enfance n° 3-4, 1984

4 IMEC: dossier S14 B4 HAC C 47.

Les Orphelins de Simitra

Les orphelins de Simitra, Hachette, Idéal-Bibliothèque, 1955.

L’ouvrage porte la dédicace suivante : « A notre filleule : ANNE-MARIE PIC. A. et P.J. », fille de Maurice Pic, secrétaire d’Etat au ministère de l’Intérieur, député et sénateur de la Drôme1.

Un roman édifiant dans lequel se retrouvent les objectifs pédagogiques de l’enseignant. Outre les valeurs morales évidentes, le jeune lecteur découvre les pays de l’Europe et doit éprouver le besoin de se repérer sur une carte. Le livre opère en sorte comme un atlas géographique vivant.

D’ailleurs, l’éditeur ne s’y trompe pas en engageant une campagne de publicité circonstanciée, chez Presse Publicité dans Bibliographie de la France (facture du 30 septembre 1955) et à Edi-Monde avec des annonces et publicités réglées pour Les Orphelins de Simitra (facture du 31 mars 1956). Le résultat est probant. En janvier 1956, l’éditeur relève dans ses registres dix-huit mille soixante-dix exemplaires vendus pour le seul exercice 1955.

Malgré le prix relativement élevé, deux cent quarante francs par exemplaire broché, quatre cent vingt francs pour un exemplaire cartonné, les ventes sont conformes aux attentes de l’éditeur, comme en témoigne le tableau des ventes suivant pour cinq exercices consécutifs.

1 Maurice Pic, est né le 15 février 1913 à Saint-Christol (Vaucluse) et décédé le 30 janvier 1991 à Montélimar (Drôme), secrétaire d’Etat à l’Intérieur, de 1956 à 1958, président du Conseil général de la Drôme de 1955 à 1985, député et sénateur de ce département de 1948 à 1989, maire de Montélimar de 1959 à 1989. Cf. Veitl, Philippe, Maurice Pic, ses agendas et la conquête de la Drôme, in Études drômoises, Ed. AUED, Valence revue trimestrielle, n°23, octobre 2005 pp. 14 à 21 et Robert, Jean François, Les maires de Montélimar au XXème siècle in Histoire et Archives drômoises, les maires de la Drôme, bulletin n°17, nov.2005, p. 49 à 76.

Exercice

Nombre d’exemplaires vendus

1955

18070

1956

6236

1957

4315

1958

2470

1959

2517

Les orphelins de Simitra, nombre d’exemplaires vendus de 1955 à 1959.

Le succès est au rendez-vous, néanmoins, il va falloir rapidement songer à une réédition dans une collection plus abordable.

Le comité de lecture souligne, pour la réédition de 1962, dans la nouvelle bibliothèque rose, « la bonne tenue littéraire de ce roman. Les différents lieux très bien décrits où se situe l’action donnent du mouvement au récit. Ce livre montre surtout la mentalité de deux orphelins qui souffrent et veulent retrouver leur patrie. Très belle analyse des sentiments des deux orphelins ». Il est également noté la remarque suivante : « On retrouve bien les qualités habituelles de l’auteur qui a su […] tirer très habilement parti d’une situation d’actualité récente : le tremblement de terre de Grèce ».

Les Orphelins de Simitra sont publiés dans la Nouvelle bibliothèque rose1 le 20 décembre 1962, non sans avoir fait l’objet d’une attention particulière comme en témoigne ce courrier en date du 21 février 1962 de Louis Mirman à l’auteur. Le passage mérite d’être reproduit dans son intégralité tant il illustre bien les rapports entre l’éditeur et ses auteurs.

« En ce qui concerne les Orphelins, […] nous pensons que le livre a terminé sa carrière, d’ailleurs bonne, dans notre Idéal-Bibliothèque. Nous l’avons examiné de nouveau et pensons qu’à quelques nuances près, il conviendrait tout à fait à notre Bibliothèque rose dans laquelle nous sommes disposés à l’adopter. Les « nuances » auxquelles je fais allusion sont certains passages d’une nature un peu trop littéraire et qui risquent de constituer des « longueurs » pour ceux dont le rythme de lecture n’est pas assez rapide. Ceci est, à nos yeux, particulièrement vrai pour quelques premières pages qui gagneraient à être soulagées de descriptions et de notations psychologiques trop lourdes pour la « Rose ». Pensez-vous pouvoir vous livrer au travail de ratissage que nous vous suggérons ? »

« Ratissée », selon les souhaits du directeur des éditions jeunesse, cette version perd beaucoup de cette profondeur dans la compréhension de la psychologie des adolescents qui caractérise si bien l’écriture de Paul-Jacques Bonzon.

1 IMEC – Dossier n° 6 – S14 B4 HAC C47

Les Orphelins de Simitra

Les orphelins de Simitra, Hachette, Nouvelle bibliothèque rose, 1962.

C’est une note du même Louis Mirman qui nous apprend, toujours lors de la réédition de 1962, que la notice en quatrième de couverture est de l’auteur. Cependant, le sous-titre a disparu. C’est la raison pour laquelle le directeur de la publication propose de le publier avec une bande portant le sous-titre « Le relais de l’Empereur ». Il y sera ajouté Prix Enfance du monde et en plus petit, ex aequo avec Jean Madeleine pour Un jour de ma vie, publié également dans la collection Idéal-Bibliothèque.

L’auteur tenait particulièrement à ce que figure le titre qu’il avait proposé. Nul doute que « le Relais de l’Empereur », endroit célèbre et connu à Montélimar ait une signification particulière et que l’indice nous soit ici livré comme une sorte de message subliminal. Dans le roman, le Relais de l’Empereur a bien accueilli un empereur. Mais pas celui auquel on se réfère à Montélimar, mais un empereur noir, le Négus. Porphyras conte l’histoire à son ami Zaïmis :

« … un empereur noir, celui d’Ethiopie, tombé en panne sur la route, s’est arrêté avec sa suite, a couché ici après s’être régalé d’une bonne omelette aux truffes et aux olives comme sait les faire Mme Barbidoux… »

Le Relais de l'Empereur

Le Relais de l’Empereur. Montélimar. (Coll. Jean Busa)

Le prix Enfance du monde a été décerné le 16 mai 1955. C’est la consécration. A Saint-Laurent-en-Royans, on ne cache pas sa satisfaction. Bien que discrète, elle est très largement partagée par la population. L’instituteur, directeur d’école, est un écrivain reconnu. On en parle à la radio. Les colonnes du Dauphiné libéré lui sont ouvertes. Pierre Vallier, journaliste et écrivain, titre dans l’édition du dimanche 11 décembre 1955 : « Ecrivain des enfants, l’instituteur du Vercors possède le comité de lecture idéal : ses écoliers ». Le journaliste, qui ne cessera de suivre l’écrivain, révèle à cette occasion deux rêves que caresse Paul-Jacques Bonzon : obtenir le prix du Salon de l’Enfance parce qu’il est décerné par un jury d’enfants et faire éditer un livre de lecture pour l’école. Le pédagogue n’est jamais très éloigné du romancier.

Prix du Salon de l’Enfance

Magnard vient de publier Mamadi le petit roi d’ébène et S.U.D.E.L. s’apprête à livrer un livre d’un genre nouveau, un conte : Fan-Lo, ou le petit poisson qui avait fait le tour du monde et des hommes…

Ecrivain reconnu, il participe à la création de l’Académie drômoise des Lettres, Sciences et Arts à Valence. La collection Idéal-Bibliothèque lui est ouverte. Successivement, vont être portés au catalogue de la librairie Hachette les ouvrages suivants : La ballerine de Majorque, Le petit passeur du lac, La promesse de Primerose, La princesse sans nom. La notoriété du romancier ne cesse de s’étoffer, solidement et de façon pérenne. Les jeunes lecteurs anglais découvrent The Orphans of Simitra. La librairie Hachette dispose en Paul-Jacques Bonzon d’une valeur sûre. Tous ses manuscrits ne sont pas pour autant acceptés. Il lui faudra se tourner vers d’autres maisons d’édition pour publier Le viking au bracelet d’argent et Mon Vercors en feu.

Le romancier rêve d’obtenir le prix du Salon de l’Enfance. Dès 1955, l’année même où il obtient le Prix Enfance du monde, Paul-Jacques Bonzon, directeur d’école à Saint-Laurent-en-Royans, présente un manuscrit intitulé Là-haut sur mes montagnes1. Il n’est pas le seul à effectuer cette démarche individuelle. Guillot, Hugon, Laffitte, Delluc, tous enseignants, briguent l’honneur de se voir distinguer. Le manuscrit de Paul-Jacques Bonzon ne franchira pas le cap de la sélection. Il est vraisemblable qu’il ait récidivé en 1956 car l’année suivante on trouve, présenté par l’auteur lui-même, un livre intitulé Nous, gars de Montélimar2

Quel est donc ce prix tant convoité ?

Il est créé en février 1953, dans le cadre du Salon de l’Enfance, de la Jeunesse et de la Famille, par Expo Action, association régie par la loi du 1er juillet 1901, organisatrice du salon.

L’article premier du règlement3 est explicite :

« Avec le souci de voir s’améliorer la littérature enfantine, dans le but d’y intéresser activement les enfants, les parents, les éducateurs et les éditeurs, l’Association du Salon de l’Enfance a décidé la création et l’attribution d’un grand prix littéraire dont la dénomination est « Grand Prix du Salon de l’Enfance ». »

Décerné tous les ans, dans la semaine qui précède les Rameaux, ce prix est destiné à couronner un ouvrage inédit (manuscrit ou livre à paraître) concernant la littérature dite « pour enfants » (romans, récits de voyage ou d’aventures, récits historiques ou scientifiques, monographies d’hommes illustres, etc.) Il est doté d’une somme de cinq cent mille francs. L’ouvrage à destination des jeunes âgés de neuf à quatorze ans ne doit comporter que cent à deux cents pages dactylographiées environ et ne pas mentionner le nom de son auteur qui doit être de nationalité française. Cette clause va évoluer. En 1963, il est ajouté au règlement que l’auteur peut être français ou étranger mais il doit être majeur et ne présenter qu’un seul ouvrage en précisant que les traductions ne sont pas acceptées. Il est également ajouté que sont exclus de la sélection tous ouvrages qui auraient déjà fait l’objet d’une distinction honorifique quelconque et, qu’en outre, le candidat s’engage à ne présenter son manuscrit à aucun autre concours jusqu’à la proclamation des résultats. Se trouve exclu tout ouvrage qui serait la suite d’une œuvre déjà parue et qui, de ce fait, permettrait de connaître ou de dévoiler indirectement l’identité de son auteur.

Rien de très original vraiment dans ce règlement, hormis le jury. Il est composé d’enfants âgés de dix à quatorze ans, de nationalité française, choisis parmi les meilleurs élèves des lycées, collèges, institutions libres et écoles communales du département de la Seine. Chacun des dix jeunes, à raison de deux par tranche d’âge, appelé à faire partie du jury, est désigné par l’inspecteur général de l’Enseignement de la Seine. Dans les faits, les membres du jury sont désignés par la Direction de l’Enseignement de la Seine et la Direction de l’Enseignement libre. Autre originalité, le jury du Grand Prix du Salon de l’Enfance est alternativement composé de jeunes garçons et de jeunes filles. En 1953, année de la création, exceptionnellement, le Prix sera décerné le 1er octobre par un jury de jeunes garçons. Jeanne de Recqueville pour Kapitan Pacha, publié par Hachette, en sera l’heureuse bénéficiaire.

Manifestement, c’est la composition du jury qui constitue un attrait particulier bien compréhensible pour des écrivains qui écrivent pour des enfants. Le jury représente précisément leur public. Paul-Jacques Bonzon trouve les mots justes lorsqu’il explique l’importance que représente à ses yeux cette récompense.

Lorsqu’il obtient le prix, cinq lauréats ont été primés avant lui. Les nommer, comme nommer ses suivants, c’est montrer justement la notoriété conférée à cette distinction.

1 Titre proposé par l’auteur. L’ouvrage sera publié par S.U.D.E.L. sous le titre « Mon Vercors en feu. »

2 L’ouvrage est publié dans la Bibliothèque Hachette, illustré par Philippe Daure, en 1957, sous le titre « La disparue de Montélimar. »

3 IMEC. Ref. HAC S1 C49/B5

Année

Jury

Titre

Auteur

Éditeur

1953

Garçons

Kapitan Pacha

Jeanne de RECQUEVILLE

Hachette

1954

Filles

Princesse Cactus

SAINT-MARCOUX

G.P.

1955

Garçons

Le cheval sans tête

Paul BERNA

G .P.

1956

Filles

Laurette et la fille des Pharaons

DIELETTE

Hachette

1957

Garçons

Cœurs sauvages d’Islande

José Marie BOUCHET

Hachette

1958

Filles

L’éventail de Séville

Paul-Jacques BONZON

Hachette

1959

Garçons

Les compagnons du Cerf d’argent

Jacqueline DUMESNIL

G.P.

1960

Filles

Les clefs du désert

L.-N. LAVOLLE

Hatier

1961

Garçons

L’aventure viking

Jean OLLIVIER

G.P.

1962

Filles

Faon l’héroïque

Maurice VAULTIER

1963

Garçons

Lauréats du Grand Prix du Salon de l’Enfance.

Le service des éditions pour la jeunesse Hachette indique, dans une note en date du 17 février 1958, les ouvrages qui seront présentés au Prix du Salon de l’Enfance 1958. Ils sont au nombre de cinq parmi lesquels figure L’éventail de Séville. Ce sont :

Titre

Auteur

Collection

Florence mène le jeu

DIELETTE

Idéal-Bibliothèque

Grichka et son ours

René GUILLOT

Idéal-Bibliothèque

Chevrette et Virginie

Françoise d’EAUBONNE

Bibliothèque verte

Le lagon aux perles

Thalie de MOLENE

Idéal-Bibliothèque

L’éventail de Séville

Paul-Jacques BONZON

Bibliothèque verte

Ouvrages présentés au Prix du Salon de l’Enfance par la Librairie Hachette en 1958.

Cette même note, confirmée par celle du 26 février1, stipule : « ne doit en aucune circonstance paraître avant l’attribution du Prix du Salon de l’Enfance, c’est-à-dire aux alentours du 1er juin 1958 ».

En cela l’éditeur se conforme au règlement. L’ouvrage doit être inédit et ne comporter aucune mention de l’auteur. Paul-Jacques Bonzon se trouve en bonne compagnie comme en témoigne la liste des ouvrages présentés après le premier tri opéré par un jury d’adultes accrédités, présidé par Bernard Lafay2, parmi plus de cent ouvrages proposés3. Le but de ce tri préalable est d’établir une sélection autant pour « écarter les envois présentant une notable insuffisance de style ou une indigence de pensée ou d’action que ceux pouvant revêtir un caractère pernicieux de quelque nature que ce soit ». Ce ne sont pas neuf manuscrits qui ont été retenus comme l’indique l’auteur de l’article mentionné mais douze, selon une note du directeur de la publication jeunesse4.

1 IMEC. S14 B4 HAC C47 dossier n°5.

2 Bernard Lafay, homme politique français, né le 8 septembre 1903 à Malakoff (Seine) et décédé le 13 février 1977. Il fut docteur en médecine et docteur ès sciences et membre de l’Académie de médecine.

3 Le Dauphiné libéré du 13 juin 1958.

4 IMEC, HAC, dossier n° 5.

Sélection

Titre

Auteur

Les sorcières de la mer

Hélène CHAULET

X

L’éventail de Séville

Paul-Jacques BONZON

Le secret de l’or

Madeleine RAILLOU

Marielle

M. DECHAUD-PEROUZE

Claire ou Clara

Claude VOILIER

Les demoiselles de Numidie

Marie-Pierre FLANDIN

Une fille courageuse

Marie-Antoinette de MIOLLIS

Le lagon aux perles

Thalie de MOLENE

X

Les horizons blancs

Charles KERVEN

Le fils des quatre as

Georges CHAULET

X

Bonjour Trésor

Jeanne CASSE

Un avion à la mer

Alex d’UNIENVILLE

X

La mafia de Saint-Laurent

Andrée AVAZERI

Mon Noël est un cirque

Danielle VIAULT et Claude MAIRET

Sélection du Grand Prix du Salon de l’Enfance 1958.

Le règlement a évolué. Le jury, composé de quatorze fillettes âgées de neuf à quatorze ans, aura à se prononcer sur les quatre romans faisant partie de la sélection finale, mentionnés dans le tableau par un « X ».

L’éventail de Séville l’emporte par dix voix sur quatorze1. Les jeunes filles, membres du jury, interrogées sur les raisons de leur choix, affirment que c’est le sort du héros qui meurt à la fin qui a été déterminant.

1 Le Dauphiné libéré, 13 juin 1958, article signé M.P.

Photo LDL

Le Dauphiné libéré du 13 juin 1958.

Le Grand Prix littéraire du Salon de l’Enfance a été remis le 12 juin 1958 lors d’une manifestation organisée au Pavillon d’Armenonville1. Le lauréat s’est prêté volontiers aux questions des jeunes filles du jury qui venaient de lui attribuer cette récompense aux couleurs d’un chèque de cinq cent mille francs2.

Cette description des démarches conduisant à l’attribution des prix de littérature pour la jeunesse témoigne de l’importance que lui confèrent auteurs et éditeurs. La récompense n’est sans doute pas négligeable mais la valeur l’est très certainement davantage. Paul-Jacques Bonzon ne s’y trompe pas. Sa réputation de romancier pour la jeunesse est désormais solidement ancrée. Néanmoins, on est en droit de rechercher les raisons du succès rencontré par ce roman qui va pouvoir disposer d’une bande annonce spéciale lors de sa publication.

1 Célèbre restaurant situé à Paris, 16 avenue de Longchamps.

2 Le Dauphiné Libéré, ibidem.

Grand prix SdE 1958

L’éventail de Séville et sa bande annonce, Hachette, Bibliothèque verte, 1958.

L’éventail de Séville est le dix-septième ouvrage écrit par le romancier. L’action se situe en Espagne, un pays qui n’est pas inconnu de l’écrivain. Il y avait situé l’intrigue de son premier roman. Préalablement, en 1956, La ballerine de Majorque, publié dans la Bibliothèque Hachette, a également pour cadre la péninsule ibérique comme l’aura plus tard Soleil de mon Espagne. Cette fois, c’est le sud du pays qu’il va choisir. Paul-Jacques Bonzon est de ces romanciers qui savent s’appuyer sur l’environnement pour nourrir son inspiration. A Saint-Laurent-en-Royans, il a su mettre à profit les informations, les souvenirs, les images que lui confiait volontiers une habitante originaire d’Espagne1.

Le roman s’adresse à des jeunes adolescents et adolescentes qui ont toutes raisons de s’y projeter. Il rencontre un vrai succès d’estime. D’abord, le cadre géographique est clairement délimité. C’est l’Andalousie. Le lecteur découvre les villes espagnoles de Séville, Grenade, Cordoue, Malaga, Cadix. Il accompagne le héros jusqu’aux îles Canaries. Le romancier parvient, par des descriptions justes et précises, à créer cette atmosphère propre à la région, y compris par des indications touristiques et cartographiques, par exemple pour se rendre de Séville à Grenade en passant par Cordoue. Les monuments, les rues, les places font l’objet d’une attention particulière afin de promouvoir chez le lecteur un ensemble cohérent d’images. Le choix du vocabulaire participe également à la construction de ces représentations. C’est en effet, chez l’écrivain, une préoccupation permanente. Il s’en explique dans la préface d’un ouvrage scolaire2: « pour que la lecture soit profitable, il faut avant tout que [le lecteur] s’y attache, que sa sensibilité soit en éveil… » Et de poursuivre : « Combien de textes, de grande valeur cependant, n’ont aucune résonance parce qu’ils ne touchent pas le jeune lecteur ».

Il n’hésitera donc pas à emprunter des mots du lexique espagnol non seulement pour nommer les personnages ou désigner les lieux mais également pour accompagner le récit de cette indispensable couleur locale. Le jeune héros parcourt la ville avec sa baladine pour proposer cette boisson rafraichissante, la horchata de chufa3, si prisée des touristes sur la plaza surchauffée de Séville, face à la cathédrale que domine la Giralda. Le recourt aux interjections locales y contribue aussi très largement : Virgen del Pilar ! Des indices, comme les maisons blanches de Cadix, des clins d’œil, comme l’évocation du peintre Murillo et Jerez, des connivences, comme celles de la Virgen de Macarena à l’église de San Gil, ajoutent à l’ambiance qui emporte inéluctablement le lecteur.

Toutefois, cela ne saurait suffire à expliquer le succès rencontré. Trois autres raisons au moins y contribuent. La première tient aux héros eux-mêmes. Les deux jeunes héros du roman, Pablo et Juanita ont le même âge. Il va d’emblée se créer entre eux une relation qui va bien au-delà de l’amitié. Dès la première rencontre, « c’était comme si, sans même l’échange d’un regard, une communication s’était établie entre elle et lui… » Ce sont manifestement des premiers émois amoureux qui ne se démentiront pas tout au long du roman allant jusqu’à la jalousie de l’objet d’amour perdu et la confrontation violente avec le rival. Cette thématique volontiers déclinée par le romancier est évidemment propice à mobiliser les projections des jeunes lecteurs. La deuxième raison tient à faire reposer l’intrigue sur des déséquilibres voire des oppositions. Pablo entretient avec le vieil aveugle Lazarillo, une relation de confiance réciproque qui peut être apparentée à la relation d’un père à son fils. D’ailleurs, après la mort du vieux Lazarillo, Pablo ne cessera de se référer à sa sagesse. A l’opposé de cette relation positive, Juanita, enfant enlevée jeune à ses parents, entretient avec Antonio Juarez, son ravisseur, des relations de soumission et de crainte. Ce secret partagé unit non seulement les deux jeunes héros mais place le lecteur au cœur même de l’intrigue. Enfin, la troisième raison repose sur une habile utilisation de la devise de Séville, No me ha dejado4. La formule fait référence au roi Alphonse X le Sage, lequel chassé du pouvoir par son fils Sanche, futur Sanche IV, en 1282, se réfugia à Séville, l’une des rares villes à lui être resté fidèle face à son fils rebelle. Dans le roman, la devise, déclinée selon les circonstances par Pablo, va diriger ses recherches dans une suite d’enquêtes à rebondissements.

Avec L’Eventail de Séville, l’auteur fait preuve d’une excellente maîtrise du roman d’enquête qui s’apparente, sous bien des aspects, au roman policier. Ce type de littérature plaît d’autant aux jeunes que la démarche est le plus souvent menée à l’insu de la force publique : « Ne laissons la police mettre son nez dans cette affaire que si vraiment il n’y a pas d’autre moyen. » Mais chez le romancier, il y a plus. Au-delà de l’intrigue, ressort chez les personnages, la quête de soi doublée de la quête de l’autre. Au fond, ce roman, témoignant chez l’auteur d’une grande finesse psychologique dans la compréhension de l’adolescence, repose sur la découverte du sentiment amoureux. C’est particulièrement bien restitué lorsque le héros, après ce passage difficile dans l’antre, noir et froid, du navire le menant aux Canaries, retrouve Juanita : « Ils s’en vont main dans la main, échangeant leurs souvenirs, comblant le grand vide de ces huit mois de silence… » Ce l’est sans doute encore davantage lorsque Juanita découvrant la jalousie de Pablo à l’égard d’Amerigo, son rival, riche de surcroît, s’écrie, en s’enfuyant : « Mais je ne l’aime pas, je ne l’aime pas ! » L’analyse est belle et juste tant sur les vrais que sur les faux sentiments. Une analyse que ne sauraient sûrement renier les psychologues de l’enfance. Mais voilà, le roman pour la jeunesse doit s’arrêter là où la convenance sociale l’exige. Le bonheur est trop beau. L’interdit ne peut être transgressé. De retour à Séville dans les beaux quartiers de la Plaza San Isabel, où Juanita retrouve la chaleur et l’affection d’une mère, Pablo a comme un pressentiment, celui des gens coupables du bonheur auquel ils considèrent n’avoir pas droit : « je t’aime et j’ai peur de te perdre », confie-t-il à sa jeune amie. La fin, car fin il doit y avoir, est évidemment dramatique. L’auteur explique qu’il a choisi cette fin car les enfants, dit-il, aiment les fins tristes5. Il y a peut-être une autre explication. Quelle suite aurait pu être apportée pour la crédibilité du roman sans donner encore davantage de force à la liaison qui s’est nouée entre les deux adolescents ? Il fallait une rupture. Celle de l’accident est irrémédiable.

Avec ce roman qui se voit attribuer le Grand Prix du Salon de l’Enfance, Paul-Jacques Bonzon acquiert une notoriété nationale qui va très rapidement franchir les frontières. Une notoriété qui lui est déjà acquise localement par son appartenance à l’Académie drômoise des Lettres, sciences et arts.

Prix étrangers

Les prix créés pour récompenser auteurs et illustrateurs pour la jeunesse sont nombreux autant à l’étranger qu’en France. Toutefois il en est un qui supplante tous les autres, celui auquel tout écrivain pour la jeunesse aspire : c’est le prix Hans-Christian Andersen, parfois appelé le petit prix Nobel de la littérature. Il est décerné à un auteur pour l’ensemble de son œuvre par International Board of Books for Young People tous les deux ans en reconnaissance d’une « contribution durable à la littérature pour enfants ». Les lauréats reçoivent une médaille d’or des mains de la reine du Danemark.

On peut imaginer aisément que Paul-Jacques Bonzon en ait rêvé. En fait, le seul écrivain français à avoir reçu cette éminente distinction fut René Guillot6, en 1964, pour l’ensemble de son œuvre.

Avec ses premières publications, rapidement traduites, notamment en langue anglaise, Paul-Jacques Bonzon reçoit une importante consécration étrangère. Il se voit attribuer, en 1962, pour The Orphans of Simitra, le prix du New York Herald Tribune aussi appelé prix du Printemps de New York7. Le New York Herald Tribune’s Children’s Spring Book Festival Award, créé par l’American Library Association, couronne le meilleur livre pour enfants paru aux Etats-Unis8. Toujours en 1962, le New York Times présente l’ouvrage comme l’un des meilleurs livres de l’année. Plus tard, en 1976, The Runaway Flying Horse est présenté à l’American Institute of Graphics Arts Book Show9.

1 Entretien avec Mme Anita Faisan, la fille de Mme Anna Herrerro, épouse Del Moral, septembre 2006 et novembre 2007.

2 Bonzon, Paul-Jacques, Le relais des cigales, Delagrave, 1967.

3 Boisson rafraîchissante préparée avec un sirop d’orgeat obtenu à partir d’une émulsion de souchet aussi dénommé amandes de terre.

4 La devise de Séville est NO 8 DO. Le 8 représente ici un écheveau de laine, madeja en espagnol. La phrase se lit donc : no madeja do, contraction de No me ha dejado, elle ne m’a pas laissé. Cette devise figure sur le drapeau municipal.

5 Le Dauphiné libéré du 13 juin 1958 : « les enfants d’aujourd’hui aiment les histoires qui finissent mal. Le temps des « happy end » est dépassé… ».

6 René Guillot, né en 1900, meurt à Paris le 26 mars 1969. Professeur de mathématiques, il effectue l’essentiel de sa carrière à l’étranger, notamment en Afrique. Destin hors du commun : passionné de faune et de flore, il s’engage dans l’armée américaine. Il reçoit la légion d’honneur. De retour en France il se consacre exclusivement à l’écriture et publiera plus de cent titres pour la jeunesse.

7 Pierre Vallier, Le Dauphiné libéré, notice nécrologique.

8 Diament Nic, Dictionnaire des écrivains français pour la jeunesse, 1914-1991, Paris, Ecole des Loisirs, 1993, 783 p.

9 Commire Anne, Something about the author, vol.22, Gale Research, Détroit, 1971, p.46.

PJB-inter

Présentation du Relais des Cigales. Delagrave. 1967.

Yves Marion

MAJ 4 novembre 2020